Une récente loi sur la vie locale permet aux établissements nocturnes de se prévaloir du droit d'antériorité. Mais attention toutefois aux mauvaises interprétations : le droit de l'antériorité n'exonère pas ces établissements de l'obligation de respecter la réglementation, notamment celle relative aux nuisances sonores.
Publiée le 28 décembre 2019, une nouvelle loi sur la vie locale fait grand bruit. Elle entendrait protéger l'activité des établissements nocturnes contre la réglementation encadrant les nuisances sonores, en leur permettant de se prévaloir du droit d'antériorité. Attention toutefois aux mauvaises interprétations : le droit de l'antériorité ne constitue pas un droit de gêner. Même si l'antériorité lui est favorable, un bar ou restaurant doit respecter la réglementation, notamment en matière de nuisances sonores.
Qu'entend-on par antériorité?
Les occupants d'un bâtiment souffrant de nuisances sonores provenant d'un commerce ou d'un site industriel ne peuvent pas obtenir réparation si les fauteurs occupaient le lieu avant eux. C'est le droit d'antériorité ou de "pré-occupation" : celui qui vient s'installer à proximité d'une activité bruyante ne peut s'en plaindre. Attention toutefois, pour se prévaloir du principe de l'antériorité, plusieurs critères doivent être strictement respectés :
- Le permis de construire a été demandé ou la prise de bail a été établie après l'existence des activités ;
- Seules certaines activités sont concernées : agricoles, industrielles, artisanales, commerciales, aéronautiques. Dans la jurisprudence, les juges ont particulièrement tenu à ce que ce critère soit respecté, en rejetant par exemple la demande d'une association exerçant une activité sociale (Cour d'Appel de Chambéry, 24 octobre 1994, SCI Patinoire, n° 1994-053104) ;
- L'exploitant doit exercer son activité en conformité avec la législation et la réglementation en vigueur, notamment en matière de nuisances sonores.
Souvent remis en cause par la doctrine, l'antériorité est aujourd'hui mise en avant pour faire valoir les intérêts de la vie nocturne.
Que dit la loi?
L'article 46 de la loi a étendu le droit d'antériorité aux activités touristiques et culturelles (en modifiant l'article L112-16 du Code de la construction et de l'habitation). Initialement, les députés avaient également prévu d'en faire bénéficier les activités sportives, mais seules ont été retenues les activités touristiques et culturelles dans le texte définitif.
Parce qu'ils considèrent les établissements de la vie nocturne menacés par « l'arsenal juridique » en matière de bruit, les députés signataires ont porté le projet au nom du « droit pour chacun d'exercer librement son activité professionnelle, dès lorsque celle-ci est conforme à la loi et aux normes en vigueur ».
Par conséquent, les bars et restaurants peuvent désormais se prévaloir du droit d'antériorité. Mais attention, les autres critères restent toujours applicables : le droit de pré-occuper ne constitue pas un droit de gêner. Si l'établissement ne respecte par les émergences réglementaires de bruit, les riverains pourront le cas échéant obtenir réparation auprès du tribunal civil ou du tribunal pénal.
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