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Une attestation pour mieux d'acoustique

Le groupement de l’ingénierie acoustique (CINOV GIAc) et le CIDB ont organisé vendredi 12 avril une journée d’information sur le thème de l’attestation obligatoire de prise en compte de la réglementation acoustique. Interventions et débats ont permis de cerner les contours de ce nouveau dispositif réglementaire qui demandera un peu de temps avant de trouver ses marques. Dans le sillage de cette manifestation, dont nous proposons une synthèse, CINOV GIAc et le CIDB organisent un tour de France pour sensibiliser les professionnels du bâtiment à la bonne pratique de l'attestation acoustique.

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Le groupement de l’ingénierie acoustique (CINOV GIAc) et le CIDB ont organisé vendredi 12 avril une journée d’information sur le thème de l’attestation obligatoire de prise en compte de la réglementation acoustique. Interventions et débats ont permis de cerner les contours de ce nouveau dispositif réglementaire qui demandera un peu de temps avant de trouver ses marques. Notamment, il faudra attendre la publication des guides « Contrôle des règles de construction – Guide de contrôle rubrique acoustique » et « Guide d’accompagnement relatif à l’attestation de prise en compte de la réglementation acoustique », prévue avant l’été, pour connaître la méthodologie précise de mesurage et la méthode détaillée de suivi des opérations. Une majorité d’acteurs voient néanmoins dans cette attestation une opportunité de mieux travailler ensemble. Dans le sillage de cette manifestation, dont nous proposons ci-après une synthèse, CINOV GIAc et le CIDB organisent un tour de France pour sensibiliser les professionnels du bâtiment à la bonne pratique de l'attestation acoustique.

Dans un souci de réduire le taux de non-conformité acoustique des constructions de logements neufs, la loi Grenelle 2 a introduit l’obligation pour les maîtres d’ouvrage de fournir un document attestant que la réglementation acoustique a été prise en compte par le maître d’œuvre ou, en son absence, par le maître d’ouvrage. Cette nouvelle réglementation vise notamment à sensibiliser les concepteurs et les entrepreneurs à la prise en compte de cette réglementation dans les logements soumis aux exigences de la RT 2012. Dans cette nouvelle génération de constructions, les réponses à ces exigences peuvent en effet se traduire par des désordres acoustiques (isolation par l’extérieur, ventilation mécanique double flux et pompes à chaleur en particulier).

Cette journée d’information a été l’occasion de mieux saisir les enjeux de ce nouveau texte, qu’ils soient pratiques ou juridiques. Nous proposons ci-après un concentré des principaux enseignements de cette journée, synthèse qui reprend notamment les propos échangés au cours d’une table ronde qui réunissait un large spectre de participants à l’acte de construire – un maître d’ouvrage, un architecte, un constructeur, un contrôleur, un thermicien, un certificateur, un industriel, un copropriétaire et un acousticien.

L’attestation obligatoire de prise en compte de la réglementation acoustique. De quoi s’agit-il ?

Le décret du 30 mai 2011 a créé l’obligation d’attester de la prise en compte de la réglementation acoustique ; l’arrêté du 27 novembre 2012 en a défini le contenu, notamment le nombre de mesures acoustiques à effectuer en fonction de la nature (individuel ou collectif) et de la taille de l’opération. En préambule de leur présentation de ce dispositif réglementaire, Anne-Marie Soulier (ministère chargé du Logement) et Loïc Boutet (CETE de l’Ouest) ont souhaité souligner que cette démarche est le fruit d’une réflexion collégiale menée au sein d’un groupe de travail représentatif des différents corps impliqués dans l’acte de construction. Dans son esprit, cette attestation est à concevoir comme une démarche qualité visant à sensibiliser les maîtres d’ouvrage, les maîtres d’œuvre et les constructeurs à la nécessité de bien prendre en compte l’acoustique dans leurs projets de construction. Ne sont concernés que les bâtiments d’habitation neufs dont le permis de construire a été déposé après le 1er janvier 2013 : bâtiments collectifs, maisons individuelles accolées faisant l’objet d’un même permis de construire et maisons individuelles contiguës ou superposées à un local d’activité.

L’attestation est établie notamment sur la base de constats effectués en phases études et chantier. Pour les opérations portant sur au moins 10 logements, des mesures acoustiques de contrôle doivent être effectuées à la fin de la construction. Le maître d’ouvrage est tenu de conserver le rapport détaillé des mesures acoustiques réalisées, selon des modalités précisées dans le modèle de rapport du guide de contrôle de la direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature « Contrôle des règles de construction – Guide de contrôle rubrique acoustique », document à paraître avant l’été. Pour réduire le risque de résultats de mesures non cohérents après travaux, un guide d’accompagnement relatif à l’attestation de prise en compte de la réglementation acoustique propose une méthode détaillée de suivi de l’opération, document également à paraître avant l’été.

Un point important : lorsque des mesures acoustiques sont réalisées, l’attestation se borne à préciser si les résultats des mesures sont « cohérents » vis-à-vis des exigences réglementaires, mais sans pour autant se prononcer sur une éventuelle conformité de l’ouvrage. En d’autres termes, quand bien même l’attestation délivrée serait positive, juridiquement, cela n’empêcherait en aucun cas un propriétaire d’invoquer une non conformité s’il avait le sentiment que son bien est le siège de désordres acoustiques.

Qui délivre l’attestation ? Qui fait les éventuelles mesures acoustiques ?

Dans le modèle de déclaration présenté en annexe de l’arrêté du 27 novembre 2012, il est prévu que l’attestation puisse être signée par n’importe quel tiers intervenant – organisme de contrôle technique, architecte, bureau d’études ou ingénieur conseil en acoustique, maître d’œuvre de l’opération ou autre –, pourvu que celui-ci soit missionné par le maître d’ouvrage et qu’il justifie auprès de celui-ci de « compétences en acoustique du bâtiment ». Sans surprise, ce terme de « compétences en acoustique », notion somme toute assez ouverte, a mobilisé une partie du débat. Frédéric Lafage, s’exprimant au nom du CINOV GIAc, a présenté son analyse. Pour lui, vue sous l’angle de la gestion des ressources humaines, la notion de compétence résulte en gros d’un ensemble de critères parmi lesquels figurent la formation (initiale et continue), l’expérience et les labels. Mais la compétence peut aussi s’appréhender à la lumière d’une analyse de la jurisprudence, laquelle semble accorder toute son importance au critère de la satisfaction du client. Dans un arrêt récent, le Conseil d’Etat a en outre considéré que la notion de compétence ne pouvait être autoproclamée (obligation d’un élément de tierce partie). Poursuivant cette idée, M. Lafage a d’ailleurs jugé bon de souligner que les qualifications Qualibat (pour les entreprises) et OPQIBI (pour l’ingénierie) sont les deux seuls labels bâtiment à avoir l’agrément COFRAC.

Jean-Marc Dautin (SOCOTEC) a donné quant à lui des éclairages sur le positionnement de son bureau de contrôle à l’égard de ce dispositif. Pour lui, la mission d’attestation est totalement indépendante de la mission PHh exercée classiquement par les bureaux de contrôle. Pour M. Dautin, si, sur une opération, le bureau de contrôle se voit confier la seule mission partielle de délivrance de l’attestation, sans autre intervention de sa part, le maître d’ouvrage devra remettre au contrôleur la liste de l’ensemble des intervenants ayant pris en charge, au niveau études et au niveau chantier, les différentes problématiques acoustiques.

Pourquoi cette attestation ?

De manière quasi unanime, les intervenants qui se sont exprimés durant cette journée ont confirmé le fort taux de non conformité (60%) rencontré actuellement dans les constructions neuves pour cause de faiblesse des performances acoustiques. Seuls les maîtres d’ouvrage d’habitations à loyer modéré semblent remettre en cause l’ampleur de ces chiffres. C’est en tout cas l’avis de Brigitte Brogat, qui s’exprimait au cours de la table ronde au nom de l’Union sociale pour l'habitat. Pour André Philippe, vice-président de l’Association des responsables de copropriétés (ARC), si le logement social recense moins de plaintes, c’est que ses occupants, en grande majorité, sont des locataires. Et celui-ci de souligner la détresse du tout nouveau propriétaire s’étant « saigné aux quatre veines » pour se payer un logement, qui découvre que l’acoustique de son habitation est défectueuse, et qui doit se lancer dans une procédure coûteuse et longue pour obtenir gain de cause.

Peu d’acousticiens interviennent dans la construction des logements, tant en conception qu’en suivi de chantier. C’est en tout cas la remarque faite par Jacques Millouet (CINOV GIAc). Cette réglementation ne devrait pas forcément changer cet état de fait, car, comme le dit René Gamba (CINOV GIAc), « L’attestation acoustique prévoit l’obligation de faire de l’acoustique, mais pas nécessairement de faire appel à un acousticien ».

Pas de miracle à attendre, mais si tout le monde joue le jeu…

Lors de la table ronde, le débat a en partie tourné autour de la question de la capacité effective de cette démarche à réduire le taux de non conformités. Car, en filigrane du respect de la réglementation, se pose l’éternel problème de la qualité effective des ouvrages. Pour François Pélegrin, président d’honneur du syndicat des architectes (UNSFA), le maître d’ouvrage reste au centre du dispositif : « Par la qualité de son programme, par le mode de dévolution des marchés, par la façon dont il choisit ses compétences, le maître d’ouvrage, au final, endosse la responsabilité ». « Les missions pas claires », « les rémunérations pas à la hauteur », expliqueraient selon lui que « la qualité ne soit pas au rendez-vous ». Brigitte Brogat (USH) rejoint ce point de vue en considérant que l’attestation acoustique ne change pas les responsabilités. Pour elle, « la qualité ne tient pas à un papier de plus » et c’est d’une « approche systémique, globale, non cloisonnée », dont le bâtiment a besoin.

Un vœu de transversalité qui est partagé par Jacques Daliphard (FFB), présent à cette table ronde à titre de représentant des entrepreneurs. Bien conscient que l’essentiel des non conformités acoustiques sont le fait de la mise en œuvre, il voit dans les réunions de chantier (et les compte rendus de chantier) le moment idéal pour consigner la traçabilité des études et de l’exécution. Et confierait bien la mission d’établissement de l’attestation au pilote. De fait, que celui-ci soit désigné par l’entreprise générale ou missionné par le maître d’ouvrage, le conducteur est présent tous les jours sur le chantier, contrairement à l’acousticien, que M. Daliphard préférerait voir intervenir pour les points particuliers, tels que l’intégration d’une pompe à chaleur ou la mise en œuvre d’une technologie innovante. Nicolas Balanant (Cerqual-Qualitel) est sur cette même ligne de pensée : « En cas de solution innovante, il faut ajouter de la compétence en conception ». Concernant le surcoût lié à l’acoustique, il a cru bon de rappeler qu’il existe des guides de conception validés par l’ensemble des professionnels du bâtiment, et que les solutions qui y sont consignées le sont aussi pour leur capacité à maîtriser les coûts. Pour M. Balanant, « la phase critique, c’est le chantier». Le CSTB, d’ailleurs, publiera d’ici la fin de l’année un guide de mise en œuvre de solutions acoustiques. Voyant d’un très bon œil ce retour en force des « mesures acoustiques » dans l’acte de construire, Jacques Daliphard estime que cette attestation se concrétisera par une meilleure sensibilisation à la nécessité de travailler ensemble.

Pierre Baux (CINOV Construction), présent à la tribune à titre de représentant de l'ingénierie thermique, partage ce point de vue. Dans un parallèle intéressant avec la réglementation thermique, il a expliqué en quoi ces démarches de déclaration administrative favorisaient les dynamiques de collaboration. Pour lui, la vraie mutation apportée par la RT 2012 réside bien dans les attestations thermiques. Malgré le surcroît de contraintes, il voit néanmoins dans l’obligation de produire une attestation thermique en amont du permis de construire une incitation à développer une méthodologie de gestion de projet privilégiant davantage de dialogue, avec l'architecte notamment. Au final, selon M. Baux, cette vision partagée des projets renforce le désir de réaliser des bâtiments plus performants.

Philippe Guignouard, le président du CINOV GIAc, partage cette vision constructive : pour lui, il faut laisser « du temps à cette démarche de s’installer » ; à l’usage, « des procédures telles que celles suggérées par M. Daliphard finiront par s’imposer ». Une vision positive que M. Philippe (ARC) a très bien résumée : « Cet arrêté est perfectible, mais laissons-le démarrer ».

Les étapes du « Tour de France de l’attestation acoustique » proposée par CINOV GIAc et le CIDB seront communiquées très prochainement.  

 

Une question sur le bruit ?