L’étude des quelques cas de jurisprudence suivants, qui portent sur des projets d’infrastructures de transport, fait apparaître que l’utilité publique de tels projets est souvent confirmée, dès lors que les conséquences à la fois environnementales, économiques, financières et sociales du projet sont suffisamment contrebalancées par l’intérêt du projet pour la collectivité, pourvu que le principe de participation (accès du public aux informations relatives à l'environnement) soit respecté et que les études d’impact soient complètes.
Modernisation d'une ligne ferroviaire
Un décret du 25 septembre 2003 avait déclaré d'utilité publique et urgents les travaux de construction liés au projet de modernisation de la ligne ferroviaire entre Marseille et Aix-en-Provence. Conformément à l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, une concertation avait été conduite dans les communes concernées avant l'ouverture de l'enquête publique, permettant ainsi aux personnes intéressées de s'informer sur le projet d'ensemble et d'émettre des observations, dont certaines avaient été prises en compte par les maîtres d'ouvrages en ce qui concerne notamment le bruit. Saisi de différents recours à l'encontre de ce décret, le Conseil d'État a fait application de sa jurisprudence relative à la théorie du bilan « coût / avantages » applicable en matière d'expropriation. Il a considéré, d’une part, que les populations des communes intéressées retireraient des avantages importants de l'amélioration de la ligne ferroviaire : amélioration des conditions de transport des habitants de l'aire métropolitaine marseillaise, développement des transports en commun par la création de nouveaux points d'arrêts, augmentation de la fréquence des trains régionaux et amélioration du service, notamment sa fiabilité, contribuant ainsi à remédier à la saturation du réseau routier dans le secteur. D’autre part, le Conseil d’Etat a estimé que les mesures prises, notamment pour limiter les nuisances sonores infligées aux riverains, étaient suffisantes. On retiendra en outre que le Conseil d’Etat a jugé que l'étude d'impact qui figure au dossier soumis à l'enquête répondait aux prescriptions du décret du 12 octobre 19771 : l’étude indique notamment les hypothèses de trafic et de conditions de circulation retenues pour déterminer les nuisances sonores potentielles liées à la modernisation de la ligne ferroviaire ; elle expose clairement les méthodes de calcul utilisées et les principes des mesures de protection contre les nuisances sonores qui seront mis en œuvre. Pour ces raisons, les inconvénients du projet et son coût ne sont pas apparus excessifs au regard de l'intérêt qu'il présente. Par suite, le Conseil d’Etat a confirmé l’utilité publique du projet. Conseil d’Etat, 27 juin 2005, n°262028, Goislard de Monsabert et a.1 L'enquête publique ayant été ouverte par un arrêté du 21 janvier 2002, les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir des dispositions du décret du 1er août 2003 modifiant le décret du 12 octobre 1977 sur les études d'impact, ce texte ne concernant que les enquêtes publiées après le 1er novembre 2000.Dans une affaire similaire, le Conseil d'État a confirmé l'utilité publique de la modernisation de la ligne ferroviaire dite « ligne du Haut-Bugey », tronçon reliant Bourg-en-Bresse à Bellegarde. Dans sa décision, ont été pris en compte la réduction du temps de transport prévue entre Paris et Genève (moins de trois heures, alors qu'il est actuellement d'environ 3h30), la remise en service des lignes de desserte locale, l'évaluation des nuisances sonores potentielles, ainsi que les mesures prises pour limiter les risques d'éboulement et les atteintes portées à l'environnement.Conseil d’Etat, 15 mai 2006, n°278942, assoc. des riverains de la ligne des Carpates